Dans La Montagne, Aline nous emmène dans son village, plus précisément dans le jardin collectif de Deux Acren. C’est là, sur ce lopin de terre où on cultivait encore les plantes médicinales il y a peu, qu’elle joue avec Sarah des morceaux de vie de celles et ceux qu’elles ont interviewés pendant un an. A travers ces rencontres, elles essayent de comprendre comment l’économie traverse nos vies, ce qu’elle nous donne et ce qu’elle nous retire. Parce qu’avant de signifier la bourse, la dette, les flux immatériels d’argent et de chiffre, la science économique désignait l’art de gérer le foyer. Sur le plateau, Wim les accompagne, dessinant en live le paysage montagneux de cette quête.
Racines et envols
«Le point de départ de “ La Montagne ”, c’est le fait de vivre ici, à Deux-Acren, confie Aline MAHAUX, qui a élu domicile non loin de la Dendre. En côtoyant les gens qui cultivent les jardins collectifs du chemin Berquet, j’ai pris la mesure d’une économie rurale en vrai. Une autre expérience traverse le projet théâtral: celle d’une randonnée en montagne, où j’ai saisi d’un coup la complexité du monde. Je me suis mise au travail à partir de ce constat d’ascensions et de descentes de nos défis les plus concrets. Ce qui m’intéresse? Le rapport entre l’humain et l’environnement, la science du lien entre l’homme et les moyens qu’il met en place pour sa survie.»
De nombreuses lectures (essais philosophiques, récits de vie, histoire locale) ont jalonné la préparation du spectacle, à tel point que les deux auteures pensaient que les livres seraient le ferment de leur création théâtrale. Cependant, les interviews des jardiniers et jardinières ont fait surgir l’essentiel de ce qu’elles souhaitaient transmettre, et de si belle façon que ces paroles sont devenues le ciment et la charpente du spectacle. «Tout est là, dans leurs mots, précise Aline. Ces artisans de la terre ont compris tant et tant de choses vitales. Et ils les disent avec force. Les lectures théoriques sont dès lors venues irriguer le travail.»
Aline a interrogé des hommes et des femmes sur un lopin de terre, cœur d’un ensemble voué à la collectivité. Michel, l’un des jardiniers, nous fait visiter le site. Il y a belle lurette qu’il s’active à faire pousser poireaux et laitues, avec succès. Quelques mètres carrés sont réservés à l’expérimentation. «On peut se servir, il faut juste me prévenir, assure-t-il. Et ici, tous les abris et serres sont construits avec des matériaux de récupération. Des outils sont à la disposition de ceux qui viennent cultiver.»
Françoise Lison (CdE)
http://www.ccrenemagritte.be/?spectacle=la-montagne
