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Lessines

Bulletin du 3 mai 2021 Conférence de Pierre BRIMBERT La peste des origines à nos jours

3 mai 2021

Notre Président Jacques VAN EGTEN accueille nos 53 visiteurs et leurs conjoints pour cette grande conférence de Pierre BRIMBERT

Pierre Brimbert est originaire de Wodecq, domicilié dans l’entité de Lessines. Après une licence en Histoire spécialisation médiévale, ULB [2002-2006], un AESS Histoire, ULB [2004-2006] et un Master en Histoire de l’Art et Archéologie, ULB [2008-2010] , Pierre BRIMBERT est professeur d’histoire à l’Athénée royal de Saint-Ghislain depuis 2009

Il est également guide à l' Office du tourisme de Lessines (Musée de l’Hôpital Notre-Dame à la Rose)  et de la ville d’Ath (Tour Burbant, Espace gallo-romain). Il est titulaire d'un brevet octroyé par la Direction générale de l’Economie et de l’Emploi de la Région wallonne en tant que Guide Conférencier de langue française.

CONFERENCE LA PESTE DES ORIGINES A NOS JOURS

La peste est une  maladie commune aux humains et aux animaux, causée par le bacille Yersinia pestis, découvert par Alexandre Yersin de l'Institut Pasteur en 1894.

Les 3 formes de peste humaine

La peste humaine peut prendre trois formes : peste bubonique, peste septicémique et peste pneumonique. La transmission interhumaine peut être indirecte par puce (peste bubonique) ou directe par voie aérienne (peste pulmonaire).

  • La peste bubonique

Forme la plus fréquente, la peste bubonique fait suite à la piqûre de la puce. La peste peut se déclarer d'abord chez les rongeurs qui meurent en grand nombre. Les puces perdant leur hôte recherchent d'autres sources de sang, et contaminent l'homme et les animaux domestiques par piqûre. Après une incubation de moins d’une semaine, apparaît brutalement un état septique avec fièvre élevée, accélération du pouls, vomissements ….

Le bubon (ganglion augmenté de volume) apparaît vers le 2e jour (visible à l'œil nu) après le début fébrile. Les aires ganglionnaires le plus souvent touchées sont le pli de l'aine ou le haut de la cuisse.

Des signes de déshydratation et de défaillance neurologique vont accélérer l'évolution de la maladie vers une mort en moins de sept jours en l'absence de traitement efficace.

  • Peste septicémique

La peste septicémique est la plupart du temps une complication de la peste bubonique, due à une multiplication très importante des bacilles dans la circulation sanguine. Il s'agit d’une forme mortelle sans traitement, mais non contagieuse.

  • Peste pneumonique ou pulmonaire

Forme plus rare que la peste bubonique, c'est la forme la plus dangereuse car extrêmement contagieuse. La peste pneumonique ou pulmonaire survient lorsque le bacille pénètre directement dans l'organisme par les poumons. Les humains sont contaminés, et contaminent, par les crachats et les projections microscopiques (toux, postillons) contenant le germe.

Après une période d'incubation de quelques heures à deux jours, s’installe une pneumopathie aiguë sévère avec état septique. Même avec un traitement antibiotique approprié, cette forme de peste est souvent mortelle en quelques jours par œdème pulmonaire aigu et défaillance respiratoire.

Au début du XXIe siècle, la peste des rongeurs sauvages reste endémique dans plusieurs régions du monde (Asie centrale, Ouest des États-Unis, Afrique notamment Madagascar...).

Rassurons-nous, la peste humaine peut être traitée efficacement par antibiotiques si le diagnostic est fait à temps, mais elle reste redoutable dans sa forme pulmonaire en milieu urbain dégradé (insuffisance du système de santé).

Causes imaginaires de l’épidémie.

Les multiples interprétations de la peste engendrent autant de réponses qui peuvent se combiner entre elles.

  • Colère divine

Dans l'Antiquité, des sacrifices étaient faits pour calmer un Dieu offensé. Le christianisme reprend cette conception, et appelle à la clémence divine par les prières, les confessions et les pénitences. Les saints les plus invoqués sont notamment Saint Adrien, saint Roch et saint Sébastien . Des messes sont dites, des offrandes sont faites (cierges gigantesques, cordons de cire faisant le tour des remparts) ; des processions ou pèlerinages sont organisés (transport de saintes reliques, ou procession des flagellants).

  • Contagion surnaturelle

Pour d’autres, la peste est le fait d'êtres surnaturels : certains déclarent avoir vu le génie de la peste sous la forme d'une flamme bleue, que l'on voit flotter dans les rues et aller d'une maison à l'autre, dans d'autres lieux on voit un fantôme, une vieille femme, ou le diable lui-même. D'autres pensent que la peste peut se transmettre par le regard des pestiférés. Divers procédés magiques sont utilisés pour repousser les esprits malfaisants : enterrement debout, exorcismes, inscriptions, croix fléchée, talisman, amulettes, pierres précieuses, protection par le chiffre quatre…

  • Empoisonnement provoqué

Une des conséquences détestables du fléau fut la flambée de violence qu’il suscita contre les juifs, accusés d’avoir importé le mal en empoisonnant les puits. Dans le royaume de France, dans la vallée du Rhin, on massacre à grande échelle, avec l’approbation des autorités. Seul le pape cherche à calmer les choses avec un argument fort logique : pourquoi accuser les juifs de propager un mal dont ils meurent aussi.

On prétend également que la peste est répandue volontairement par des groupes malveillants, contre lesquels on exerce représailles ou persécutions. On prétend que les engraisseurs enduisent les murs et les portes des maisons de graisses maléfiques, mais les professionnels accusés de tirer profit de la peste (barbiers-chirurgiens, soignants, parfumeurs, croque-morts…).

  • Corruption de l'air et théorie miasmatique

La théorie médicale dominante de la peste est la corruption de l'air par des effluves souterraines (vapeurs pestilentielles), le sous-sol étant le lieu de la décomposition. Ces vapeurs infectes (miasmes) réalisent autant d'ascensions venimeuses qui retombent sur les hommes d'une région donnée. Le venin passe à travers les pores de peau pour corrompre les humeurs. Il peut se transmettre par les hommes d'un pays à l'autre. La peste est une pourriture des humeurs.

La lutte contre les miasmes de l'air passe par de grands bûchers, des plantes aromatiques, des parfums, la fumée de tabac… Le masque à bec de canard contenait des plantes aromatiques aux propriétés désinfectantes mais permettaient surtout de supporter l'odeur de la mort. En fait cette puanteur était considérée comme la cause du mal et sa manifestation tangible. Une éponge, placée devant la bouche et imprégnée de vinaigre, était censée protéger de la contagion.

Principales épidémies

La peste a eu de nombreux impacts dans l'histoire humaine. Trois grandes pandémies sont distinguées : la première pandémie (VIe au VIIe siècle), la deuxième pandémie (XIVe au XVIIIe siècle) et la troisième pandémie (1855 - début du XXe siècle).

  • Première pandémie : peste de Justinien

La peste de Justinien  (seconde moitié du VIe siècle) identifiée avec une grande certitude à la peste bubonique, est la première pandémie connue de peste (les « pestes » précédentes restent incertaines quant à leur nature exacte). Elle a sévi à partir de 541 jusqu'en 767, dans tout le Bassin méditerranéen, avec un épisode paroxysmique jusqu'en 592; elle suit les voies de commerce du Bassin méditerranéen, ravage à plusieurs reprises l’Italie, les côtes méditerranéennes, remonte le Rhône et la Saône, atteint même l’Irlande et la Grande-Bretagne.

  • Deuxième pandémie : peste noire

En 1346, les Mongols de la Horde d’Or assiègent Caffa (actuelle Théodosie), un port de Crimée dont les Génois ont fait un comptoir commercial. Ils ont des pestiférés dans leurs rangs. Des rongeurs qui passent sous les fortifications transmettent la maladie aux Italiens. Les deux camps sont bientôt si affaiblis qu’ils signent une trêve. Les Génois repartent en bateau, emmenant dans leurs soutes le sinistre présent. La maladie débarque avec eux à Constantinople, puis à Messine, puis à Marseille. Cela fait si longtemps que le mal a disparu que la population n’a plus aucune immunité.

Les recherches archéologiques récentes ont confirmé qu'il s'agissait d'une épidémie due au bacille Yersinia pestis.

En trois ou quatre ans, la mort s’étend de façon infernale : toute l’Europe, toute l’Afrique du Nord, le Proche et le Moyen-Orient (peut-être aussi l’Afrique subsaharienne mais, faute de documentation écrite, on n’en a pas la certitude).Entre un quart et un tiers de la population d’Europe disparaît. Seuls quelques îlots sont épargnés (comme la ville de Milan) pour des raisons difficiles à éclaircir.

Par la suite, le fléau réapparaît à intervalle régulier en Europe, tous les dix ou quinze ans mais, en général, il est circonscrit à une région ou une ville. Ath et Lessines ne furent pas épargnés à de nombreuses reprises du XIVème au XVIIème siècle.

  • La troisième pandémie (peste moderne)

Appelée aussi peste de Chine ou de Mandchourie, cette pandémie naît au milieu du XIXe siècle sur les hauts plateaux d'Asie centrale. En 1891, elle est signalée à la frontière du Tonkin et de la Chine, elle explose à Canton et Hong Kong (1894), puis à Bombay (1896) et à Calcutta (1898). Elle fait le tour de la mer d'Oman, du golfe Persique et de la mer Rouge. Elle touche alors de nombreux ports sur tous les continents, où elle est le plus souvent bloquée par les mesures prises.

Cette dernière pandémie donne lieu à l'ensemble des découvertes modernes sur la peste. Alexandre Yersin, médecin, disciple de Pasteur, découvre le bacille responsable de la peste (1894) et un sérum anti-pesteux (1896).

Mesures prophylatiques

À partir du XVIe siècle, l'Europe découvre les mesures d’isolement

Exemples

  • Mur de la peste édifié dans les monts de Vaucluse afin de protéger la région de la peste qui frappa Marseille et une partie de la Provence en 1720-1722. S'étirant sur 27 kilomètres, il est bâti en pierre sèche. Le long de ce mur, des guérites en pierre sèche accueillaient des gardes.
  • Séparation des malades dans les hôpitaux, avec désinfection et fumigation des maisons,
  • Isolement des malades,
  • Désinfection du courrier et des monnaies,
  • Création d’hôpitaux hors les murs,
  • Incinération des morts
  • Les théâtres londoniens sont automatiquement fermés pour limiter la contagion, lorsque le nombre de morts de la peste dans la capitale dépasse quarante par semaine. Les fermetures durent plusieurs mois, parfois plus d'une année.
  • La mise en place de passeport sanitaire,
  • La quarantaine systématique des navires suspects

Tout cela s’avère parfois efficace pour éviter de nouvelles épidémies mais chaque relâchement de l’attention rappelle sans tarder les conséquences possibles.

Nil novi sub sole.

Les principaux acteurs de la lutte contre la maladie

Parmi les principaux acteurs, il y a lieu de citer Le médecin de peste, appelé aussi docteur de peste, était un médecin spécialisé dans la prise en charge de la peste bubonique. Engagés et payés par les villes touchées par l'épidémie pour s'occuper des riches comme des pauvres. Rendons leur hommage pour leur dévouement, car le contact avec les pestiférés va entraîner un taux de mortalité élevé parmi eux.

Au XVIIe siècle et XVIIIe siècle, certains médecins portent un masque en forme de long bec blanc recourbé (ce bec de corbin fait qu'ils sont alors comparés à de lugubres vautours) rempli d'herbes aromatiques conçues pour les protéger de l'air putride.  

Certains médecins de peste portent un costume spécifique, bien que des sources graphiques montrent une grande variété de vêtements non spécifiques.

Charles DELORME, premier médecin de Louis XIII imagine en 1619 un costume protecteur : « le nez long d'un demi pied (16 cm) en forme de bec, rempli de parfums n'a que deux trous, un de chaque côté à l'endroit des ouvertures du nez naturel (…)  Sous le manteau, on porte des bottines, faites de maroquin (cuir de bouc et de chèvre) du levant, des culottes de peau unie qui s'attachent aux dites bottines et une chemisette de peau unie, dont on renferme le bas dans les culottes, le chapeau et les gants sont aussi de même peau... des bésicles sur les yeux ».

Des épices et herbes aromatiques (thym, matières balsamiques, vinaigre …) sont tassées ou imprègnent des éponges qui sont enfilées à l'intérieur du nez  Les médecins de la peste utilisaient une baguette de bois pour examiner leurs patients sans contact direct ou pour tenir les gens à distance.

La peste  à Lessines

Le conférencier va aborder la peste à Lessines. Cette partie fera l’objet d’un prochain article.

Rendons cependant, en guise de conclusion, un hommage tout particulier aux religieuses de l’Hôpital Notre Dame à la Rose qui se dévouèrent pour soigner les malades au péril de leur vie et se rendirent à Ath pour venir en renfort de leurs consoeurs de l’hôpital de la Madeleine.

INFORMATION ROTARIENNE

En complément à cette brillante conférence, nous vous joignons un clip vidéo sur l'action du Rotary International en vue de l'éradication de la POLIO (Merci à notre club contact le  Rotary-Club d’Evry-Courcouronnes-Corbeil qui nous a transmis le lien )

« Polio+, Pourquoi nous devons continuer … » :

Version Polio+/CLIP https://www.youtube.com/watch?v=wHyNWoISwb8&t=2s

  

ACTUALITES

Lettre du Gouverneur de MAI 2021

https://lessines.rotary2150.org/fr/activities/news/4515/lettre-du-gouverneur-mai-2021

REPRISE PROCHAINE DE NOS ACTIVITES EN PRESENTIEL

https://lessines.rotary2150.org/fr/activities/news/4514/reprise-prochaine-de-nos-activites-en-presentiel

SUR LES TRACES DE NAPOLEON EN WALLONIE PICARDE

https://lessines.rotary2150.org/fr/activities/news/4541/sur-les-traces-de-napoleon-en-wallonie-picarde

CITATION DU JOUR

Les vraies conquêtes, celles qui ne donnent aucun regret, sont celles que l’on fait sur l’ignorance Napoléon Bonaparte

 

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