Paul Harris, inventeur des clubs
service, sa philosophie du Rotary
Paul
P. Harris est né en 1868, mais l’histoire de sa vie commence à l’âge de trois ans, lorsqu’il
arrive à Wellington, avec son père et son frère Cécil, par le train, en plein
d’une nuit d’été ; Wellington est un bourg situé dans le Vermont, Etat du
Nord-est des Etats-Unis, en Nouvelle Angleterre. Ils arrivaient chez son
grand-père et sa grand’mère, qui allaient devenir ses véritables parents, à
défaut de son père qui a sombré dans de mauvaises affaires, et vit séparé de sa
mère.
P.
Harris est ainsi élevé par ses grands -parents dans une ferme comportant un
verger et un potager, qu’il fallait labourer, planter, fertiliser, sarcler,
récolter…,avec un troupeau de vaches… pour donner une nourriture
qualifiée d’«étonnante ». Sur cette terre peu fertile, au climat
rigoureux, on menait une vie frugale, rythmée par des pratiques religieuses
bien codées et par l’école à la campagne…Cette société laborieuse forgeait les
caractères ; elle a donné des hommes qui ont joué des rôles importants
dans les affaires du monde.
Dans
cette même région, à Wallinford, s’était développé une petite industrie de
machines et d’outils liés à l’agriculture, (pelles et fourches, charrettes,
bols…) ; les jeunes qui envisageaient de se lancer dans le commerce commençaient dans un magasin local, puis
allaient compléter leur apprentissage à Rutland, le siège du comté, puis, en
cas de succès, se risquaient à chercher des opportunités plus sérieuses à
Albany et même New-York et Boston. P. Harris entreprend des études et obtient,
en 1891, un diplôme en droit, de l’Université d’Iowa, qui lui ouvre la
profession d’avocat.
Mais
il commence par cinq ans d’errances et de vagabondage, qui seront pour lui
riches d’expériences diverses…et, finalement, s’installe à Chicago.
Au
début du XXème S. la ville de Chicago est une métropole du Middle West qui,
comme le reste du pays, résulte d’un grand brassage sociétal, où les races, les
opinions politiques, économiques et religieuses divergentes se
rencontraient ; c’était une ville dure, agressive, surprenante, dans la
quelle rien ne semblait encourageant : les méthodes n’étaient guère en
accord avec une éthique de haut niveau et ses principes de respect des
consommateurs, des employés et des concurrents. Le temps était venu d’un
changement pour le meilleur.
Paul
Harris le raconte dans son livre « Ma route vers le
Rotary » : « à Chicago, une chose essentielle me manquait :
la présence d’amis. Le philosophe,
essayiste et écrivain américain, au XIXème S., Ralph Emerson disait : celui
qui a un millier d’amis n’a jamais un ami à négliger…Or, les premiers
temps, dans ma cité d’adoption, je n’avais ni le millier ni le seul. Et une
idée me vint : pourquoi, dans ce grand Chicago, ne pas avoir un groupe
d’amis de métiers différents, sans tenir compte ni de leurs opinions politiques
ne de leurs religions, avec une large acceptation des opinions de chacun
d’entre nous ? Est-ce Que cette amitié ne pourrait pas faire le lit d’une
entr’aide mutuelle ?
C’est
ainsi que lui vint une idée…
Après
cinq années de cheminement, en février 1905, j’ai demandé à trois jeunes
professionnels de me rejoindre et je leur ai présenté un simple projet de
coopération mutuelle et d’amitié toute simple telle que chacun l’a connue dans
son village. Ils acceptèrent mon plan…
Nous
sommes devenus plus nombreux, dans une amitié renforcée dans l’esprit d’entre
aide entre nous et envers notre cité. Le banquier, le boulanger, le pasteur et
le plombier, l’avocat et le blanchisseur ont découvert la similitude des
objectifs de chacun, les problèmes des succès et des échecs. Nous avons appris
que nous avions beaucoup de choses en commun. J’avais l’impression d’être de
retour dans ma Vallée de la Nouvelle Angleterre.
C’est
ainsi qu’il créa, en 1905, un club, mot d’origine britannique, qui désignait
une association culturelle, sportive ou politique, un cercle où l’on se
réunissait pour lire, parler, jouer…ou encore un groupe de personnes partageant
les mêmes goûts ou se trouvant dans la même situation. Paul Harris, en donnant
à son club, bientôt appelé ROTARY-CLUB, (parce que ses membres se réunissaient
à tour de rôle chez ses membres), une vocation caritative, avait inventé les
CLUBS-SERVICE.
L’idée
allait rapidement prospérer : le club-service réunit des femmes et des
hommes qui ont envie de servir une cause ou une œuvre, tout en développant
des liens d’amitiés.
C’est
ainsi que le Rotary s’est développé, avec la devise : l’amitié
par le service…et s’étendit avec Inner-Wheel (qui réunissait d’abord
les épouses de rotariens), et, pour les jeunes, Interact-club et Rotaract…
En
1915, à Detroit, naissait Kiwanis International, mot indien
(« nunkee-wan-nis ») signifiant Nous avons plaisir à partager nos
talents.
En
1917, Melvin Jones créait les LIONS CLUBS, avec un emblème qui symbolise
la force et le courage, sur une couleur pourpre qui symbolisait la loyauté. Son
nom signifie Liberty, Intelligence, Our Nation’s Safety et sa devise est
We serve…
En
1921, à Philadelphie, le Soroptimist, dont le nom signifie le
meilleur pour les femmes, est un club-service dont le recrutement
est féminin…La mixité ne viendra dans les clubs-services que dans les années
1980, mais c’est une autre histoire…
Mentionnons
également le Zonta, club-service interprofessionnel, fondé en
1919 ; ou la Table Ronde, pour des hommes de moins de 40 ans, qui,
ensuite adhèrent aux clubs 41.
Les clubs-service, si divers soient-ils, ont des
modes de fonctionnement proches ; partout, en s’y intégrant, ses membres
s’engagent à servir les autres et à consacrer du temps pour les actions du club :
que ce soit la collecte de fonds pour financer des programmes d’aides et de
soutien, ou l’organisation d’œuvres sociales par les membres eux-mêmes, et des
rencontres par des dîners, des soirées à thèmes , des conférences, ou des
voyages faits ensemble…
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Mais
revenons au Rotary, et à Paul Harris, pour examiner maintenant la philosophie
qu’il y a inspirée, qu’il expose largement dans son livre de mémoires.
Paul
Harris n’est devenu président de son club qu’à la troisième année de son
existence ; il s’était donner les ambitions suivantes :
Faire se développer le club
de Chicago ;
Etendre le mouvement aux
autres villes ; « avoir des amis dans le monde entier est une
bénédiction ».
Intensifier l’action
d’intérêt public comme objectif des clubs.
Dès
le début, le Rotary abordait une approche différente de celle des autres clubs
à cette époque : le Rotary a été comme un oasis dans un désert. Ses
réunions étaient bien plus intimes et plus amicales. Tout ce qui pouvait
devenir une entrave ou être de peu d’intérêt était banni ; les attitudes
hautaines et en retrait restaient bloquées à la porte ; les membres
étaient à nouveau des enfants. Pour moi, la participation à une réunion du club
était synonyme de retour à ma maison dans la vallée.
Le
concept originel du Rotary s’est répandu ; ses idéaux ont été
exposés ; ses objectifs bien mis en avant ; mais l’amitié profonde et
informelle demeure le moteur essentiel de sa substance. Les membres
s’apportaient une entraide mutuelle dans tous les domaines, qui reposaient sur
les relations cordiales et l’esprit d’amitié.
Du
fait de la croissance du nombre des membres du groupe de Chicago, il est décidé que chaque membre soit le représentant
unique d’une profession, chacun devant considérer que la sélection constituait
le privilège de représenter sa profession avec la responsabilité qui s’y
rattache. Le Rotary n’a pas pour objectif d’imprimer à ses membres une
connotation sociale, ni religieuse, ni raciale : il réunit des
professionnels bien différents dans leurs situations sociales, leurs croyances
religieuses et leurs nationalités, pour leur permettre de mieux se comprendre
pour générer de la sympathie, de l’amitié et de l’entraide.
En
1908, Arthur Sheldon, membre du club, créait une école de vente qui reposait
sur l’idée que le succès de la vente dépend du service rendu et qu’une
transaction n’est pas justifiée tant que les deux parties ne sont pas bénéficiaires ;
ceci convenait tout naturellement au groupe, qui allait en faire un critère des
« quatre questions ».
Puis
le Rotary s’étend…
P.
Harris fait siens les doutes du St Thomas de l’Evangile : il n’y a qu’une
façon de convaincre celui qui ne veut croire que s’il voit, c’est de réaliser
ce qu’il nie…et le meilleur moyen de réaliser des choses c’est de les faire
soi-même. Ainsi, racontez toujours P. Harris, je me mis au travail, avec
comme objectif d’initier des Rotary Clubs un peu partout dans les E.U. et dans
le monde : au Canada, en Grande Bretagne, en Irlande, en Amérique latine,
en Australie et Nouvelle Zélande…plusieurs milliers de rotariens de haut niveau
dans les milieux d’affaires se sont consacrés au Rotary avec générosité.
C’est
alors que les clubs ont été regroupés dans des districts, avec l’élection de
gouverneurs.
C’est
alors que le mot « service » a été inscrit dans les statuts des
clubs, avec tout qu’il sous-tend et dans toutes ses implications :
l’instauration d’une conscience civique et d’un nouvel art de vivre dans des
centaines et petites cités et de villes, avec des campagnes de nettoyage, l’organisation
de camps pour garçons, de groupes musicaux…Ceux qui ne pouvaient pas contribuer
par l’argent le faisaient par leur travail.
L’appartenance
au Rotary impose au participant l’obligation de transposer à son environnement
commercial les idéaux et les principes qu’il détient du Rotary ; il doit
s’efforcer de les faire apprécier et adopter par tous ceux qui appartiennent à
son milieu professionnel.
Les
Rotariens sont les premiers bénéficiaires des méthodes du Rotary et ceci
corrobore l’idée que cela vaut la peine et constitue une source de satisfaction
pour ceux qui servent dans le mouvement :
En s’intéressant à ce que
l’on appelle les Quatre Voies de l’Action : l’action intérieure au service
du club, (c’est l’administration des affaires de son club) ; l’action
professionnelle, (qui concerne l’éthique dans la conduite des affaires) ; l’action
d’intérêt public (qui concerne le bien-être de la communauté dans laquelle il
vit) ; et enfin l’action internationale, (qui consiste à promouvoir la
bonne volonté et le compréhension).
Celui qui assiste avec
régularité aux réunions de club y puise un enrichissement de sa vie grâce aux
contacts divers et aux relations amicales et grâce aux sujets culturels qui
apportent un plus à son mental et à son moral.
Pourquoi
cet attachement au Rotary ? C’est l’amour de l’homme envers son semblable.
L’amitié est le socle sur lequel reposer le Rotary et la tolérance est le
facteur qui assure sa cohésion.
Extrait de la conférence de Joseph NOUVELLON au RC Evry le 14 décembre 2021
Pour découvrir le texte intégral de la conférence suivre le lien suivant https://lessines.rotary2150.org/fr/content/news/show/11066