Centenaire, le Rotary interroge son management

dimanche 24 décembre 2017

La structure du Rotary, qui a longtemps fait la force de l’organisation, pourrait ralentir son renouveau. - Shutterstock

Association de membres issus des milieux d’affaires et des professions libérales, le Rotary impeccablement organisé en districts et en zones cherche à infléchir le fonctionnement des clubs pour attirer la relève.

Le Rotary réfléchit à sa mue. Réseau de décideurs solidaires établi dans le paysage, il s’est toutefois éloigné de son orbite initiale. « Le vœu du créateur, le juriste Paul Harris, était d’encourager les relations professionnelles entre les habitants de différentes nations, au bénéfice de la paix », rappelle Gérard Allonneau, administrateur du Rotary international et à ce titre membre du board of directors (le conseil central) de l’organisation à Evanston (Illinois). Invités à placer leurs compétences professionnelles au service d’autrui  « au-delà des frontières et des nations », les membres, issus des milieux professionnels et des professions libérales, ont démultiplié les projets. « Or le caractère multi-services de l’organisation ne contribuait pas à la clarté de l’image. Les nouveaux membres, et c’est d’autant plus vrai des jeunes, ne s’engagent que lorsque la cause est visible », estime cet ancien chef du département de l’IUT de Poitiers et directeur des études de l’École supérieure de Commerce de Poitiers, membre du Rotary depuis 1990. Par petites touches, Gérard Allonneau essaie désormais de dissocier Le Rotary de son image de société de bienfaisance. « Son rôle n’est pas d’organiser des galas de charité ou des cagnottes mais d’honorer sa devise, Servir d’abord ».

Si le programme phare reste l’éradication de la poliomyélite à travers un programme de vaccination ambitieux « End Polio Now » conduit en partenariat avec la Fondation Bill & Melinda Gates, les porte-drapeaux de l’association accompagnent le programme international de bourses d’études dans le monde, participent à la formation des jeunes ou encore montent des opérations de don de sang.

Donner un autre tempo à cette organisation tentaculaire, composée de zones _correspondant à de vastes territoires géographiques_ hiérarchisées n’est pas une mince affaire. Cette structure, qui a longtemps fait la force de l’organisation présente dans 200 pays, pourrait ralentir son renouveau. La relève pourrait discuter ces process de formation formels, qui conduisent les gouverneurs à suivre de rigoureux séminaires de formation et à recevoir des mains même du président de Rotary International, leur feuille de route. « Les nouveaux membres souhaitent passer à l’action tout de suite, mesurer leur impact, élargir d’emblée leurs horizons et leurs réseaux », évalue Gérard Allonneau.

Comme le ferait un manager, l’administrateur français du Rotary distille désormais dans ses interventions quelques leçons de motivation  : « Le rôle du gouverneur est d’encourager les dirigeants du district à cultiver leur enthousiasme et surtout à prendre des mesures précises pour atteindre les objectifs » détaille-t-il, en rappelant les vertus du leadership. « Un chef sera adoubé par les jeunes professionnels s’il est participatif, créatif, décontracté et convivial. Il devra laisser s’exprimer le leadership de chacun et faire place aux opinions divergentes et aux idées nouvelles.  »

L’administrateur, qui encourage l’initiative et la décentralisation des décisions, annonce quelques innovations comme la possibilité d’utiliser des subventions de district pour des projets « innovants », rappelant que « le mouvement n’interdit rien ».

Le Rotary International, qui planche sur sa vision de long terme avec le cabinet Grant Thornton, a également assoupli son organisation en soumettant de nouvelles formes de clubs (satellite, clubs de jeunes professionnels) et de nouveaux statuts de membre (associé, corporate) inspirés des Rotaract, ouverts aux 18-30 ans, sans contraintes de réunions à date fixe avec des cotisations plus faibles. « Les bénévoles que nous cherchons à recruter manquent de temps, occupés sur plusieurs fronts et engagés auprès de leur famille. C’est une variable à intégrer  ».

Preuve du changement d’ère, le Rotary parle numérique. Habitués à retrouver leurs amis dans un « nuage », les jeunes Rotariens devraient apprécier la plateforme My Rotary, et pourront tenir des réunions en ligne, fidèles en quelque sorte à l’étymologie du nom _Rotary symbolisant la rotation des lieux de réunions. « La demande des jeunes est affective et leur besoin d’appartenance à un groupe est palpable. Quelle que soit sa finalité, une organisation devra se considérer comme une « famille » et soigner l’aventure collective ». En France, le Rotary a plus que jamais besoin de sang neuf.


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